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Pêcher en compétition : pourquoi et comment?

Publié le par Arno39

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Le but de cet article est de mieux comprendre ce qui peut pousser un individu à entrer et à rester dans le monde de la compétition halieutique. Il a aussi pour objectif de décoder quelques tenants et aboutissants de ce choix même si la liste restera de toutes façons non exhaustive.

Il ne s’agit ni de décrier ou de vénérer la compétition dans le monde de la pêche sportive, mais de mettre en exergue quelques leviers et hypothèses d’analyse.

  En jonglant entre vie professionnelle et familiale ( les compétitions ont souvent lieu le WE ) , les adeptes de la pêche en compétition, viennent d’horizons distincts avec souvent en fil rouge, le goût de la victoire et le culte de la performance. Parfois anciens compétiteurs sportifs reconvertis, il semble que la recherche d’adrénaline pousse certains à franchir le pas pour venir en « découdre ».

 

1) Un sport ?

L’ex APCPL devenue GN Carla va dans ce sens et voit le jour avec les accords de la FFPSC (Fédération Française de Pêche Sportive au Coup) et du Ministère de la Jeunesse et des Sports. Ce besoin de légitimité passe par une institutionnalisation de la pratique pêche. «  Une des conséquences de ce développement, au-delà du sport, sera de rendre la pêche de loisir accessible à tous, localement, au travers de la création des clubs ».

Le côté « sportif » viendrait du fait de pouvoir capturer et relâcher ses poissons (catch and release). La traque dure plusieurs heures et impose une concentration et une capacité d’analyse des situations à toute épreuve. Un sport n’a pas besoin d’exister à travers le seul indicateur de la dépense énergétique. (équitation Vs marathon ).

 

2) Une vue de l’esprit.

Le monde des compétitions de pêche semble dominé par des pensées de victoire sur l’autre, mais peu sur soi-même. On parle de défi, de manche, d’épreuve, de classement, bref des termes directement empruntés au monde de la compétition sportive traditionnelle. Il y a une dramatisation de l’évènement où les gladiateurs s’affronteraient en quelque sorte dans l’arène. Il s’agit à mon avis plus souvent de buts « d’égo » ( être le meilleur, prendre le plus gros poisson, le plus grand nombre … etc ) que de buts de « maîtrise » ( se perfectionner, modifier ses techniques, apprendre à lire le milieu, s’adapter, échanger avec les autres concurrents… ).

 

3) Etre le meilleur : un non-sens !

L’idée d’être meilleur que ses concurrents impose le fait qu’il y ait un niveau, un classement et une hiérarchie entre les individus. C’est très discutable quand on sait que le poisson finit toujours pas décider… Il est actif à un moment sur un poste X et inactif sur le même poste 30 minutes plus tôt ou plus tard. Si vous passez au bon endroit au bon moment, vous aurez toutes les chances de le prendre même avec un niveau technique modeste ! Le choix du leurre et de l’animation ( je me mouille un peu ) n’ont pas forcément plus d’importance que ça sur un poisson très actif contrairement à des fishs apathiques où l’action du pêcheur aura plus d’impact sur l’attaque du poisson ( choix du leurre, présentation, animation…etc ) .

Tout ça pour dire qu’à mon sens il y a bien des pêcheurs plus compétents que d’autres sur une technique précise, mais de là à étendre ce constat pour dire qu’un tel est meilleur qu’un autre, est un non-sens . Sylvain Legendre en personne a fait capot à la 4ème manche du Défi Est Prédators à l’Ile Chambod ( Sylvain si tu nous lis J ) , alors que sur le papier il est cent fois meilleur sur la pêche du broc que tous les compétiteurs réunis. Catégoriser les compétiteurs ( celui-ci est très fort, celui-là moins ) est une aberration. Nous avions trop tendance avec Oliv à penser que certains pêcheurs du défi Est étaient très forts l’année dernière et d’autre moins. C’est absolument faux d’avoir un tel raisonnement et nous avons revu notre copie. Les concurrents dangereux sur le papier ont enchaîné les capots et d’autres moins attendus (comme nous) se sont montrés plus réguliers. Didier ( Rouméas) et Medhi (El Bettah) vainqueurs 2 années de suite du défi Est, n’ont pas pu prendre un poisson maillé en 4 manches l’année suivante. Je doute qu’ils se soient affaiblis techniquement durant l’hiver… Où est donc la logique ? Pourquoi cette absence soudaine de réussite ?

 

4) la réussite justement

Encore une fois, à mon humble avis, beaucoup de compétiteurs ont trop tendance à attribuer l’échec ( un capot, un poisson non maillé, un poisson décroché … etc ) , à une cause EXTERIEURE . C’est le principe d’attribution causale externe : une météo trop chaude ou trop froide, le vent, la couleur de l’eau, la position à l’avant ou à l’arrière du bateau, la vitesse de la dérive… Tout devient prétexte pour se dédouaner en quelques sortes de sa mauvaise performance. Certains discours vont même jusqu’à expliquer l’échec par des stratégies d’auto-handicap mises en place pour rendre la frustration plus tolérable : « j’ai pêché cette zone mais je savais que c’était risqué, c’était quitte ou double… si j’avais pêché celle-ci j’aurais cartonné » !

Et oui mais la pêche était ailleurs ce jour là…

Je pense que la frustration est exacerbée en compétition et que toutes les raisons évoquées sont bonnes pour se sentir moins dévalorisé. Faire capot sur une manche n’a pas le même impact qu’un capot sur une sortie plus ordinaire.

 

5) Le capot en question

Ce point fait aussi référence au comptage des points en compétition. Toutes les formules existent et sont plus ou moins avantageuses pour les uns et les autres. Il ne s’agit pas de cracher dans la soupe. Personnellement, je vais à la pêche pour prendre du poisson et un système de points sanctionnant les équipages «  capot » me paraîtrait plus cohérent. La régularité est alors récompensée et évite le hold-up en écrasant une manche pour enchaîner 3 ou 4 capots sur le reste de la saison et gagner l’épreuve au général.

 

6) L’argent

Loin des grands shows à l’américaine, la plupart des compétitions de pêche en France ne permettent pas aux concurrents de vivre de cette passion. Les rares personnes parvenant à tirer leur épingle du jeu travaillent souvent pour des grosses boîtes du monde de la pêche, conçoivent, testent, imaginent des produits nouveaux et attractifs. Il semblerait que les motivations soient donc ailleurs pour la plupart des compétiteurs. Bien sûr, il existe des enjeux financiers en amont ( sponsoring, « obligation » de résultats et publicité notamment) , mais pas suffisants pour expliquer la présence de tous les compétiteurs sur ces manifestations. Le côté élitiste de certaines compétitions françaises ne rapporte pas des millions aux participants comme c’est le cas dans d’autres pratiques sportives ( foot, F1, golf etc …) . Il y a bien d’autres enjeux, plus symboliques en amont, quant à l’implication dans la pêche en compétition.

 

7) Le matériel.

Chacun encore une fois, fait des choix, use de stratégies matérialistes personnelles au service de ses techniques de pêche. Personnellement je m’en veux d’emmener une pleine caisse de leurres les jours de Défi qui pour la plupart d’entre-eux ne serviront pas. L’erreur serra corrigée dès cette année. On se dit souvent : «  et si ça marche avec ce leurre qui est resté à la maison »… Sauf que l’on pêche toujours avec les 10 mêmes leurres ou les 20 mêmes pour les plus optimistes d’entre-nous. Pourtant on veut être le premier à croire au leurre miracle le jour J, leurre qui n’existe pas. Pure invention de l’esprit. Les couleurs, formes, actions sont des créations humaines qui essaient de nous faire penser ce que pense le poisson et c’est chose impossible. Encore une fois, je pense que la compétition, mais ça n’engage que moi, exacerbe les besoins en achats compulsifs.

 

8) L’expérience :

Chacun expliquera l’échec ou la réussite de la manière qu’il l’entend : chance, technique, hasard ou autres… Comme souvent, si le plaisir est au rendez-vous, c’est bien là l’essentiel.

Je préfère parler d’erreur que d’échec tant il faut des années et des années pour maîtriser un peu mieux son sujet. Et cet apprentissage est sans fin. L’idée est de multiplier, pour progresser, les expériences, les échanges et les lieux de pêche ( lire un milieu très vite en décodant les paramètres clés ) .

Se laisser le temps d’apprendre est un paramètre  indispensable sans oublier qu’il ne s’agit que d’un jeu, que l’enjeu dépasse parfois avec des jalousies et des enfantillages dignes des cours de récréation.

 

9) Les pré-fishing

Parfois décriées, parfois glorifiées, les sessions pré-fishing peuvent induire les compétiteurs en erreur comme les aider le jour J.

Si la lecture des fonds à l’échosondeur semble indispensable, le fait de matraquer une zone avant l’épreuve n’a pas grand intérêt. A Seyssel sur le Rhône en 2012, nous faisons 2 brocs en 10 minutes en pré-fishant en vue de la 4ème date, et arrêtons aussitôt les frais en se disant «  la bonne aubaine » , dans 15 jours … Finalement nous remportons la manche grâce aux perches et sandres après avoir essayé en vain les brocs sur le hot spot pendant près de 2 heures.

 

10) Quelques pistes pour conclure

-          Les capacités d’adaptation sont à mon sens l’arme indispensable aux progrès en tous genres. Observer pour mieux comprendre et analyser où est la pêche en quelque sorte, même si parfois la pêche est nulle part…

-          La lecture du milieu est le fruit d’un travail de tous les jours. Si en parallèle, le sens de l’eau est un minimum présent, il y a fort à parier que les résultats suivent.

-          Les conditions du jour ( nature des fonds, luminosité, présence de courant, température de l’eau … etc ) vont nous faire opter pour une ou des techniques prédominantes. La technique est donc la conséquence de la lecture du milieu.

-          Le choix de l’espace ciblé en priorité, est une des clés de la réussite ( choix de l’espèce recherchée en priorité en fonction de la configuration des lieux).

-          Les a priori sont nos pires ennemis.

-      Un mental fort est la condition sine qua non pour atteindre les objectifs fixés : il y a toujours un poisson à prendre. Le renoncement n’a pas sa place même quand les conditions sont très difficiles.           

-           

Don’t give up !

 

PS : Merci à Raph et Claudia pour la super organisation du Défi Est Predators.

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G
Merci, on va essayer de limiter les dégats pour les deux dates qui restent (spots totalement inconnus pour le coup !). A bientot donc ! :-)
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A
Merci pour tes 2 commentaires. Pour le préfishing je suis 100% de ton avis. C'est indispensable ! A condition de ne pas matraquer la zone. Les poissons, dans ce cas, huit jours après sont encore<br /> sous le choc sauf certains brocs qu'on peut reprendre plusieurs fois. Je trouve donc que le règlement du défi évolue bien en passant à 15 J avant la compét. Pour le second argument, je dirais que<br /> prendre moins de risques est subjectif. Rester 7 heures sur 100 m comprend le danger d'être capot si les poissons ne se décident pas ... Alors que battre du terrain peut faire gagner une manche au<br /> risque de tout perdre... en passant sur des postes où les poissons ne sont pas encore en activité. Encore une fois, être là au bon endroit au bon moment est la clé. Nous aussi nous nous sommes<br /> plantés en beauté sur des secteurs bien connus ( Vouglans au Hasard) et même 2 années de suite. Ce serait à refaire en 2013, on referait complètement différemment . Toutes les équipes partent avec<br /> un feeling et une petite conviction... Pour le reste , c'est vrai que c'est souvent quitte ou double en fonction de la stratégie choisie tu as bien raison. Mais qu'est-ce prendre des risques encore<br /> une fois? Rester 7 heures dans une fosse ou battre 5 km de rive? POur certains la 1 pour d'autres la 2. Enfin en ce qui concerne les stratégies d'auto-handicap, je les explique comme étant des<br /> moyens de dédramatiser l'échec et de diminuer les frustrations. Elles interviennent dans les MOTS après les manches, et rarement dans les actes pendant l'épreuve. Peu de compétiteurs sont maso au<br /> point d'aller pêcher des secteurs désertiques. C'est plus dans les discours de débriefing qu'elles apparaissent. En tous cas, bonne chance pour le 2 , si on peut parler de chance . :) et idem pour<br /> le 30 . ^^
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G
Salut,<br /> <br /> J'aurais deux réaction, assez constructives, je l'espère, sur ce sujet interessant de la compétition :<br /> <br /> 1/ Je voulais préciser que le préfishing peut se limiter à du repérage : trouver les nombreuses zones d'herbiers à Heuyilley lors d'un repérage préalable par exemple aurait été un plus pour choisir<br /> les zones à prospecter, sachant que les brocs de 50-60cm squattent ces spots jusqu'en octobre-novembre...<br /> => Même sans pêcher, du repérage au sondeur ou à vue, c'est un plus indéniable.<br /> <br /> Mais même si le préfishing peut te foutre dedans (à St Jean on avait préfishé le spot et rentré 4 poissons maillés au pont en 1h... sauf que le jour J il ne s'est rien fait au pont et on a perdu 2h<br /> à le décortiquer) la connaissance du spot et des reliefs peut te sauver la mise (solution de repli : herbiers épars sur fond propre qui abritaient deux poissons de 80+ qu'un bigbait sut<br /> décider...).<br /> <br /> Bref, pour moi je pense qu'un préfishing (au sens large) ou une connaissance des lieux vaut mieux qu'une découverte du spot le jour J.<br /> <br /> 2/ Les risques que l'on peut choisir de prendre en optant pour des stratégies aventureuses. Ce n'est pas de l'auto-handicap nécessairement, cela s'apparente plus au quitte ou double. Tu pêches à St<br /> Jean durant 6 heures avec une canne XXH pour tenter de décider de gros poissons, s'ils sont de sortie, banco, sinon dommage... ; tu pêches la finale de Villers hors des bancs de petits sandres avec<br /> des leurres de 5" à 7.5" pour faire moins de poissons mais des plus gros, c'est un un risque qui peut payer, mais c'est aussi potentiellement casse-gueule... Après j'avoue que les pêcheurs prudents<br /> réussissent souvent mieux :-)<br /> <br /> Bref, ces sujets méritent d'être débattus et cet article nous éclaire tous,<br /> <br /> à bientot au bord de l'eau !
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A
Salut Will. Ce sont toujours les mêmes équipes c'est vrai . Pourquoi .? Parce que ces mecs ne sont pas des manches c'est sûr mais aussi parce qu'ils ont l'occasion de pêcher les meilleurs spots en<br /> France et à l'étranger toute l'année. Ils connaissent tout le monde, tout le monde leurs propose des sorties sur des hot spots ce qui aide bien les choses en plus de leur niveau technique. Si tu<br /> pêches sur des zones sans poissons, t'auras beau être compétent techniquement, tu prendras rien.
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W
Par rapport à l'article 3 , sur les compètes afcpl, on remarques que ces sont souvent les mêmes team qui reviennent dans le top 5 , il n'y a pas de hasard, certaines équipes sont meilleures que<br /> d'autres!!<br /> <br /> Après sur le défi au dela de la 4-5ème place ca se joue souvent avec un poisson, donc au cm ou mm près.<br /> Quelques mm peuvent faire gagner (ou perdre) de nombreuse place. Mais la on ne choisi pas.
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A
Merci à vous 2 pour vos commentaires. Oui, c'est vrai que l'intuition ou le fameux feeling porte conseil dans bien des situations.
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C
Et puis l'intuition. Ce n'est que mon avis, forgé sur mon expérience au bord de l'eau, mais je l'écoute très souvent et la respecte car alliée à un bon sens de l'eau (l'un ne va pas sans<br /> l'autre)elle se révèle très souvent primordiale.Merci pour cet article, j'ai pris du plaisir à lire ces quelques lignes même si je ne fais pas de compèt.Fréd'eau
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J
Tout est dit ou presque dans cette analyse qui fait bien ressortir l'engouement pour la compètition : engagement personnel ,dépassement et recherche de l'efficacité ,adrénaline....<br /> Et effectivement "Never give up" !
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